je serais là / Jordan

Il est tôt ou tard, en fait je ne sais pas très bien l’heure qu’il est. Je me suis réveillé en sursaut une fois de plus et j’ai eu besoin de prendre l’air, d’aller me changer les idées et j’ai été courir. J’en ai besoin, pour me changer les idées, pour me vider la tête. C’est la seule chose qui arrive réellement à me calmer, courir, j’ai l’impression de faire quelque chose de bien quand je cours. Je me rappelle certaines mission la plupart du temps et même pendant que je cours je suis obligé de m’arrêter parce que j’ai des images qui me reviennes en tête et j’ai du mal à respirer, du mal à me dire que je suis dans la réalité. Je m’arrête de courir et pose mes mains sur mes genoux, j’essaie de respirer mieux, de retrouver mon calme, mais je n’y arrive pas. Je n’ai pas tellement fait beaucoup de chemin. Je suis dans la rue de ma sœur Jordan, mais il tôt, je doute qu’elle soit réveillée, alors je vais m’assoir sur un banc en espérant que ça me passe.

Je ne me rends pas compte mais je fini par m’endormir. J’en avais surement besoin et je ne sais pas pourquoi, mais dehors je me sens plus en sécurité que chez moi. C’est un peu bizarre, mais j’ai souvent dormi à la belle étoile, sans doute que je devrais installer une tente dans mon jardin ou un hamac, peut-être que j’arriverais à dormir. Je crois que j’ai dormir une heure, ou deux peut-être, mais je dormais bien. C’est seulement parce que j’ai entendu un bruit de branche qui craque que je me suis réveillé en sursaut évidement et en alerte et je soupire quand je me rends compte que c’est ma sœur. Elle doit se demander ce que je fiche là.

« Salut, je voulais venir te dire bonjour, mais il était tôt, j’ai attendu ici mais … je me suis endormi … »

Je n’avais pas envie non plus de retourner chez moi, je ne m’y sens pas vraiment comme chez moi … c’est un peu compliqué.

Jordan s'est levée tôt. Ce matin-là, elle n'a plus pu trouver le sommeil et l'excitation passée pour Halloween n'y est pas pour grand chose. Des cauchemars, elle n'en fait pas si souvent, pourtant cette nuit l'a emmenée dans des affres lugubres dont elle ne garde que peu de souvenir, si ce n'est cette angoisse persistante au réveil et des sueurs froides. Un coup d'oeil aux chiffres illuminant de vert sa chambre à coucher lui indique qu'il n'est encore qu'à peine cinq heures du matin, mais elle sait qu'elle ne parviendra pas à trouver à nouveau le sommeil. Elle reste pourtant quelques minutes à regarder son plafond, tergiversant en pensée sur l'ordre de ses actions à venir.

L'une d'elle, en tous les cas, est programmée dans sa tête depuis la veille : passer chez Naël déposer un essai de pain de patate douce. D'ordinaire, c'est un banana bread typique qu'elle lui aurait apporté, mais elle avait décidé de modifier la recette au dernier moment, en remplaçant les fruits par les tubercules... et en l'agrémentant de graines de sésame. Rien de très surprenant quand on connaissait sa coutume de modifier à sa sauce un peu toutes les recettes qui passaient à sa portée, mais qui pourrait surprendre ceux qui ignorent son habitude. A Derry, cependant, peu sans doute savent encore grand chose sur elle, si ce n'est ceux qui la côtoient dans ses activités professionnelles ou bénévoles, et sa vie privée leur reste inconnue. Il n'y a bien que ses frères pour subir ses tentatives culinaires !

Une douche brûlante a achevé de la réveiller, et elle s'est préparée pour sa journée comme elle le fait chaque jour, programmant mentalement ses différentes activités, avant d'embarquer un sac renfermant son offrande pour son aînée. Elle ne s'attendait pas ne pas terminer la route jusqu'à chez lui et à le trouver endormi sur un banc près de chez elle. Au bruit de la brindille morte craquant sous sa chaussure, il s'est éveillé en sursaut, et l'inquiétude peint un instant les traits de la cadette de la famille.

« Naël ?
- Salut, je voulais venir te dire bonjour, mais il était tôt, j’ai attendu ici mais … je me suis endormi…
- On a vu plus confortable... »

Elle tourne ça sur le ton de l'humour, la dérision pour désamorcer l'embarras et l'atmosphère lourde qui commence à s'installer.

« Ca tombe bien, je comptais passer chez toi... Tu veux monter prendre un café ? J'ai un peu de temps devant moi pour la peine, puisque je ne fais pas de détour finalement... »

Un sourire chaleureux sur les lèvres, elle attend la réponse de son frère, à peu près certaine qu'elle sera positive. Si elle s'inquiète de son état, son ESPT ne semblant pas près de s'arranger malgré les semaines et les mois passés, elle préfère être la pause joviale et ensoleillée qui illumine sa journée plutôt que l'oiseau de mauvais augure qui lui prédit pire s'il ne sort pas de cette situation.
Pour le moment, en tout cas...